L'ombre du reconfinement

 

Batailles choisies #218

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Il fallait s'y attendre, mais c'est le choc: nous sommes reconfinés. Écoles et crèches sont fermées. 1 maison, 3 enfants. Envoyez du soutien.


 

(J’ai écrit ce texte il y a quelques jours. Il résonne particulièrement aujourd’hui) 


Pour l’instant, nous ne sommes pas reconfinés.

Pour l’instant.


Une carte de l’agglomération de Santiago montre les communes confinées et celles qui sont encore, quoique précairement, déconfinées. Toutes les communes au Sud sont en quarantaine, en rouge sur la carte. 

Quelques communes au Nord restent en jaune, dont la ville où je vis.

Le jaune est une couleur bien fragile...

Ma commune est menacée par tout ce rouge, qui s’approche au galop des villes du Nord. L’envahisseur va bientôt ordonner le siège: en cas de quarantaine, les écoles et les crèches seront fermées. Les autorisations de sortie seront fortement réduites.


J’angoisse de me retrouver comme l'année dernière, prisonnière de la maison, suffoquant des demandes des enfants, me noyant certains jours, avançant dans une forêt de ronces les autres. 


L’annonce ne saurait tarder. Combien de temps encore?


(Aujourd’hui)

École et crèche sont fermées depuis ce matin.

J’ai les deux aînés à la maison.

Le bébé dans les bras.

Le mari en réunion dans le bureau.


Le reconfinement est annoncé pour deux semaines. J’imagine que ce sera davantage. Je me raccroche à la pensée naïve que ce ne sont que quelques semaines, à la pensée égoïste que notre commune sera déconfinée avant les autres, comme ça avait été le cas l’année passée.  


L’année passée. J’y replonge donc, dans ces flots houleux! Notre océan a un peu changé, en un an: la rive me semble plus proche (deux semaines, c’est peu) mais mon radeau est plus instable, avec un troisième enfant.

   


En colère.

Résignée.

Optimiste.

Pessimiste.

Inquiète.

Épuisée.


Je suis en colère - encore sur moi que ça retombe au prix de ma santé physique et surtout mentale, à moi qui supporte mal d’être esclave de mes enfants, d’être sans espace à moi. J’en ai tellement marre que le poids du fonctionnement du monde repose sur mes épaules - non: mon dos.


Résignée - j’ai cherché à faire venir quelqu’un pour m’aider, mais qui? Nous sommes tous confinés, les déplacements contrôlés. Qui? Personne, personne ne pourra venir. Il n’y a rien à faire.


Je suis optimiste - ce ne sont que deux semaines, cette fois, pas possible que ce soit davantage, vaccination bien engagée, deux semaines, comme des vacances, comme de très mauvaises vacances.

 

Pessimiste - à quoi occuper Milieu toute la journée? Il est si actif, en pleine période d’opposition et de construction, je ne vais pas y arriver, je vais en venir à le détester comme aux pires heures du premier confinement! 


Inquiète - et mon dernier-né, comment m’occuper de lui? Comment lui donner le calme et l’attention que réclame un nourrisson?


Je suis épuisée.


Et je dois descendre parce que j’entends que ça crie dans la maison.

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