La spirale coupable

 

Batailles choisies #243

Vous aussi vous tombez parfois dans une spirale de culpabilité maternelle complètement irrationnelle? Ce serait quoi la vôtre? 🌳


 

Un jour, j’ai écouté un épisode des Pieds sur terre, il y a bien trois ou quatre ans, qui m’a complètement chamboulée. Il y était question d’une école des bois, aux îles Canaries ou bien Baléares - je ne suis plus sûre. Ce dont je me souviens vivement, c’est à quel point je me suis sentie, à son écoute, mauvaise mère.

La femme qui témoignait expliquait avoir créé une crèche en plein air, dans la forêt (des enfants accompagnés de quelques professionnelles), pour éviter à son fils les crèches municipales, où la routine des personnels semblait plus importante que le bonheur des petits. 

Début de la spirale.

Mes enfants à moi ne vont pas dans une école des bois, où on joue dehors par tous les temps!

Mes enfants à moi ne passent pas leurs journées dans une forêt, à grimper dans les arbres et sauter par-dessus des ruisseaux! 

Mes enfants n'apprennent pas, au contact de la nature, à reconnaître feuilles, chants d’oiseaux et champignons!

Mes enfants ne vivent pas hors du temps social, à leur propre rythme!

Mes enfants ne connaissent pas le bonheur!



J’ai mis des semaines à me remettre de cette culpabilité.  

Je me suis sentie si mal! Quelle mère terrible je fais, incapable de tout lâcher et de déménager illico en Espagne pour que mes enfants puissent vivre dans les bois!

Les miens passent plus de temps dedans que dehors. Ils vont à une crèche et une école en ville, si loin de la plus quelconque des forêts.

Je devrais aller là-bas!

Ou fonder ma propre école des bois!

Ou m’installer à défaut, à la campagne!

Je suis si égoïste!

Plouf.

Me voilà au fond du puits de culpabilité, au bout de la spirale.



Ce qui rend cette spirale si vertigineuse, c’est que s’il y avait une école des bois ici, j’y mettrais mes enfants. Je trouve le concept merveilleux, suis de l’idée que vivre dehors jusqu’à six ans au moins est un vrai cadeau. Une enfance au grand air me rappelle aussi, ceci expliquant sans doute cela, mes jeunes années, vécues à la montagne, à écouter le glouglou des torrents ou dans la forêt, à grimper dans des arbres centenaires. 

Je souffre par chutes ponctuelles en spirale coupable de ne pouvoir donner à mes enfants l’enfance que j’ai eue. J’ai l’impression de ne leur en offrir qu’un succédané.



Il m’a fallu des semaines pour me remettre de l’école des bois. Ça m’a demandé beaucoup d'efforts. J’ai dû remonter la spirale comme une corde à nœuds, bout par bout, le puits centimètre par centimètre, dans le seau de la sottise dans lequel j’ai chu, en me convaincant avec toute ma rationalité que je leur donne une belle vie, quand même. 

Pourtant, à chaque fois que j’y pense, à cette école des bois, je reprends un petit vertige de culpabilité - attention, la margelle est glissante! 



La prochaine fois, si vous pouviez faire un reportage sur une école du sport, ça m’aiderait.



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