Le temps des mamans

 

Batailles choisies #73

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Pas le temps de lire tout de suite?

En deux mots:

Cuisiner le dîner avec son enfant dans les pattes porte un nom savant - savant et pas terrible. Vous le saviez?


 

J’ai envie de réfléchir au temps qu’une mère passe aux tâches domestiques et parentales, ou plutôt, à la manière dont on calcule le temps passé à effectuer ces tâches. 

Pour les études statistiques et sociologiques, on demande aux parents de comptabiliser les minutes qu’ils passent à différentes tâches: “combien de minutes consacrez-vous à la préparation du repas, au linge, aux jeux, au bain, aux déplacements vers l’école” etc. 


Mes soirées ne se décortiquent pas

Mais mes journées à m’occuper des enfants, ou mes soirées, ne se décortiquent pas ainsi, en minutes consacrées à chaque tâche domestique ou parentale. En fait, mes soirées ne se décortiquent pas du tout.

Allez, on rentre les enfants, enlevez vos chaussures, rangez-les, argh, ils rangent jamais, je le fais, faut que je mette une lessive, ils sont dégoûtants, non, arrêtez de vous disputer, allez, on lit un livre, voilà, je vais en lire un autre mais il faut que j’étende la lessive, et mince, qu’est-ce qu’on peut manger ce soir, allez, les enfants, on sort faire deux courses et on cuisinera ensemble le dîner, tant pis ils vont encore en mettre partout, allez, on remet ses chaussures, je dois plier les vêtements en rentrant et préparer le sac de l’école, vider le lave-vaisselle, non mais arrêtez de vous battre, là, c’est pénible...






Est-ce qu’une telle soirée équivaut réellement à 2 min (rangement) + 10 min (linge) + 15 minutes (soutien émotionnel) + 15 min (jeux avec les enfants) + 30 min (cuisine) etc…?




Ça revient à juger la performance d’un homme-orchestre en comptant le nombre de notes qu’il a jouées.

Enfin, la femme-orchestre, dans ce cas.

Un gloubiboulga de tâches domestiques



La vie de parent, et particulièrement de mère, puisque les femmes portent majoritairement le poids de la famille, est un gloubiboulga de tâches domestiques et parentales qui se font presque toutes en s’entrecroisant, en s'emmêlant. 

Les tâches parentales et domestiques ne sont pas uniquement cumulatives, elles sont aussi simultanées.



Dans la comptabilisation minute par minute des tâches, il y a donc quelque chose qui se perd: l’effet “bourbier” du quotidien de la vie de famille - bourbier, pas étonnant qu’ils soient tout le temps dégoûtants. Et il y a ce qui reste invisible, la charge mentale, qui consiste précisément à faire la lessive maintenant parce qu’elle sera prête avant le dîner qu’on va préparer en même temps que Grand lit un livre, et chercher à cuisiner avec ses enfants parce que ça fait d’une pierre deux coups, de deux tâches une tâche et une occupation.  

la garde passive

  

Il existe un terme technique pour décrire ce double travail: cuisiner avec votre enfant (par exemple) s’appelle de la “garde passive”. 

Ça vous convient à vous, ce terme? Moi pas vraiment, parce que j’ai remarqué que mes enfants se laissaient rarement gardés passivement. D’ailleurs, ils sont rarement passifs tout court.

On perd dans ce terme le double poids des tâches, l’aspect cumulatif. 

Peut-être proposer alors comme terme, le temps alourdi? Le temps doublé? Le temps gloubiboulga? La garde augmentée? Le millefeuille de tâches? Je ne sais pas encore, rien ne sonne assez bien (ou mal). 



Je me dis que ce ne serait pas inintéressant de considérer que le temps maternel se calcule par soustraction, et non par addition: l’opération de soustraction consisterait à dire:  temps d’éveil (7h de sommeil)- temps de loisir (Netflix, 1 heure - et ça ne compte pas si vous pliiez le linge en même temps) = temps de travail domestique et parental.

J’ai le sentiment que ça ferait augmenter le temps parental, que ça empêcherait les femmes de sous-estimer (comme elles le font) leur temps de tâches ménagères et parentales, que ça empêcherait les hommes (comme ils le font) de surestimer leur implication.


Ça permettrait de confirmer par A + B, avec chiffres à l’appui, que cuisiner une quiche avec un enfant de 2 ans, c’est pire que de cuisiner une quiche, ou que de s’occuper d’un enfant de deux ans. Qu’en faisant les deux en même temps on résout deux problèmes et on en crée un troisième - la cuisine pleine d’oeufs dégoulinant. 

 
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