Ça arrive

 

Batailles choisies #116

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En deux mots:

Ça arrive de ne plus pouvoir sentir ses chers et tendres enfants.


 

Ça arrive comme ça.

Comme ça, sans crier gare.

Alors que tout se passait bien, alors que je me suis davantage reposée depuis deux jours que dans les derniers six mois. 

Mais ça arrive quand même: je retiens mes larmes. En fait, non, je ne les retiens pas, elles sortent toutes seules.

Petit est dans mes bras, il chouine, il me tire par ici, par là. Si je le pose, il me poursuit en hurlant. Il crie. Je ne sais pas ce qu’il a, bien dormi, bien mangé, bien entouré depuis ce matin. Juste il pleure, il m’accapare, me réclame quelque chose que je n’arrive pas à donner et il m’insupporte. Et les larmes qui montent. 

Pourtant, on est dans le jardin de ma belle-mère, le soleil brille, les oiseaux chantent malgré un vent froid. Pourtant, quel week-end en famille! Grand-mère, tonton, tata, trois adultes de la meilleure volonté pour nous aider avec les enfants, nous aider à recharger nos batteries. Mais non, Petit est de la pire humeur, il m’horripile, combien de temps encore il va être comme ça, combien de temps je vais devoir le prendre dans mes bras, le consoler, dans combien de temps ça s’arrête d’avoir sans arrêt un mioche dans les pattes.

C’est comme si après deux jours où j’ai été enfin soulagée avec les enfants, où ils ont trouvé d’autres adultes pour répondre à leurs sollicitations, où j’ai pu respirer, passer la charge à d’autres, je me rends compte que non, je ne suis pas sortie de cette situation si difficile à tenir, je suis encore avec un poids que j’ai de plus en plus de mal à porter.

Comme si je comprenais, après une matinée difficile, que le soulagement qu’on m’offre ici n’est qu’un vernis. Un tout petit week-end de repos sur des mois et des mois de fatigue.

Ça arrive, je sens les larmes monter, j’essaie de les retenir pour ne pas m’effondrer devant la famille, pour ne pas devoir expliquer aux proches pourquoi je suis dans un tel état de fatigue, pourquoi je ne supporte plus mon cadet alors qu’ils ont fait leur possible pour s’en occuper. J’ai peur qu’ils ne comprennent pas vraiment. 

J’ai juste envie de laisser Petit là, de le balancer par terre, j’ai envie de lui mettre des baffes. Ça arrive. 

Et comme je ne peux pas le faire, je pleure. 

Ça arrive. 

 
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