Un mois chez Belle-Maman

 

Batailles choisies #241

Bilan des préjudices matériels, moraux et psychologiques du (premier) mois de reconfinement chez ma belle-mère. 🧮


 

Un verre brisé en mille morceaux (par maladresse, je suis fatiguée)

Huit remarques sur l’importance de l’autorité parentale

Une respiration profonde

Quatre parallèles entre ses fils et les miens

Une respiration profonde

Trente sourires pincés

Treize idées d’activités à faire avec Milieu pour stimuler son apprentissage, hein, tu t’en occuperas, Héloïse?

Sept soupirs retenus

Quatorze paires d’yeux levés au ciel discrètement

Une assiette brisée en mille morceaux (par maladresse, je suis fatiguée)

Une respiration profonde

Dix-sept repas trop salés

Trente-cinq portions trop copieuses - un peu moins, si possible, mais c’est très bon, hein, c’est juste un peu trop pour moi

Cinq bons gros gâteaux pleins de beurre

Vingt-deux ordres proférés de manière autoritaire

Seize demandes criées depuis le fond du jardin

Un pot en verre brisé en mille morceaux (par maladresse, j’ai voulu aller trop vite)

Un fond de casserole brûlé (je l’ai oubliée sur le feu, fatiguée, vous dis-je)

Un bol acheté il y a trente ans cassé en deux (j’ai marché dessus sans faire exprès)

Une question passive-aggressive au détour d’un déjeuner (et en France, les parents sont aussi laissez-faire que toi?) 

Le vase préféré hérité de la grand-mère brisé en mille morceaux à cause d’un tout petit coup de coude

Un rire contenu

Trente-neuf conseils sur l’éducation de mes fils 

Une culpabilité décuplée

Des dizaines de piques bien senties que je me suis retenue de lui envoyer

Une respiration profonde

Un sentiment d’échec - ah, avec moi, les enfants, ils mangent de tout

Sept portes qui claquent mentalement

Huit départs imaginaires de grande tragédienne, puisque c’est comme ça, je m’en vais

Une respiration profonde 


Des dizaines de lessives que je n’ai pas faites

Des centaines de repas que je n’ai pas préparés

Des heures passées sans Grand ou sans Milieu, occupés à jouer dehors

Une respiration profonde

Une joie infinie de savoir mes enfants grandissant à la campagne, jouant avec des bouts de bois, des cailloux et les fraises des arbousiers alors qu’au-delà du terrain, le monde brûle, tousse et se meurt 

Une immense gratitude

Une immense fierté qui m’empêche de la remercier avec effusion 

Une respiration profonde.


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