C'est pour quel âge?

 

Batailles choisies #263

Offrir un cadeau de fête des pères à son mari, c’est un peu réconcilier l’homme et le papa. ⚙️


 

Nous sommes dans un magasin de jouets avec Grand qui veut offrir un cadeau à son petit frère Milieu dont c’est bientôt l’anniversaire.

- Et si on achetait quelque chose pour Papa aussi? C’est bientôt la fête des pères, tu te rappelles, je t’ai expliqué.

Covid oblige, on doit rester à l’entrée du magasin et demander à la vendeuse. 

- Je cherche quelque chose qui se construit, quelque chose de technique, peut-être des legos, mais un peu complexes?

- Oui, c’est pour quel âge?

- Euh, 38 ans.


Mon mari a une âme d’enfant, simple et gentille. Aucun pull, aucun livre n’égalera jamais un cadeau que je lui avais ramené d’un voyage au Japon il y a presque dix ans: un stylo qu’il fallait construire soi-même, multiples pièces minuscules comme un mini lego, qui trône encore fièrement sur son bureau comme une coupe.


Un cadeau de fête des pères, c’est l’occasion pour moi de faire une petite attention, de celles que j’aimerais avoir pour lui, mais que le temps qui glisse, englouti par les enfants, m’empêche d’avoir. Un cadeau à un mari fatigué par la pandémie, par le travail, par les années de mauvais sommeil. Un cadeau en forme de cœur. Un cadeau en forme de truc à construire.

Dans le fond du magasin, j’aperçois deux boîtes qui me tapent dans l'œil, deux boîtes qui promettent des pièces, des vis, des boulons, deux boîtes que je l’imagine ouvrir avec enthousiasme, se mettant immédiatement au boulot, penché, appliqué, avec le même bonheur concentré que les matins de Noël de son enfance: une mini éolienne et un véhicule (une canette et quatre roues) se mouvant à l’énergie solaire.


À partir de 8 ans. Oui, ça convient parfaitement. 


Un cadeau à l’homme que j’aime et au père qu’il est devenu, celui qui aimerait passer plus de temps avec ses petits, celui qui leur transmet cet esprit d’ingénieur - là, il ne faut pas compter sur moi. 


J’hésite. L’éolienne ou le véhicule? Non, que diable: les deux, il le mérite.

 

Il va être content, doublement content. À moins qu’au lieu de fabriquer ses trucs dans le fond du garage, seul et tranquille, il se retrouve avec les deux grands qui lui grimpent dessus, jettent les boulons, cachent les vis en lui criant dans les oreilles “bonne fête papa!” avant de se mettre des coups de pieds entre frères parce que l’un a dit “moi d’abord” et que l’autre n’est pas d’accord.


C’est une possibilité égale. 

On attend la fête des pères et on verra bien quel diable sortira de ces boîtes.


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Heloise Simonmari, cadeau